Souvenirs, souvenirs...

La veille du match de coupe de France contre DIGNE

 

16 et 17 janvier 1982, 13 joueurs, 2 entraîneurs, et une poignée de dirigeants de l'UGA séjournent dans un hôtel de la région lyonnaise. Ils sont rassemblés la veille du match comptant pour le 7e tour de la Coupe de France contre Digne, un club de 3e division.

 Pàco PINERO, adjoint de l'entraîneur de l'U.G.A., François GOMEZ, nous confie: "pour tous les joueurs ici rassemblés, la compétition de demain, c'est du sérieux. Ils se prennent au jeu. Ils se sont entraînés plusieurs fois dans la semaine.

"La compétition de demain", c'est le septième tour de la Coupe de France. En effet au sixième tour de cette compétition, le dimanche 20 décembre 1981, les Décinois avaient "sorti" un gros: Cuiseaux- Louhans. Cette équipe évolue en effet en 2e division. Il ne paraissait pas évident de l'emporter, si ce n'était d'y penser. La presse sportive du même jour, en présentant la rencontre, ne titrait-elle pas: "contre Cuiseaux, l'U.G.A. rêve d'exploit."

L'exploit, l'U.G.A. l'a réalisé. C'était même la première fois qu'un ensemble de 2e division évoluait en compétition officielle sur la pelouse du stade municipal de Décines.

Cette victoire lui vaut d'être opposée, le 17 janvier, à DIGNE, équipe de division 3.

  

 Le public ne comprendra pas…

Cette rencontre avec un club de division inférieure à Cuiseaux n'enchante pas OBITZ, le gardien, un vétéran, à 29 ans, de l'équipe décinoise. En effet, il dit: "pour nous, le match de DIGNE sera plus dur. Le public ne comprendra pas que l'on perde, puisque l'on a sorti un club de 2e division."

François GOMEZ sent et comprend cette inquiétude. C'est pourquoi il a décidé de rassembler les joueurs dès la veille du match. Pour lui, il s'agit de resserrer un peu la communauté des joueurs, de se donner les moyens de mieux souder l'ensemble. Le choc si important du lendemain mérite un atout psychologique de cet ordre.

L'enjeu est d'importance, en effet. Si les joueurs décinois1'emportent, ils sont qualifiés pour les 32e de finale de la Coupe de France; et ils peuvent espérer rencontrer un "grand de 1ere division". "Le rêve de tout footballeur" nous déclareront-ils tous!

Le rêve prend un allure imagée parfois: "si on tombe MARSEILLE et qu'on les batte, alors là, ce serait la bombe atomique." Si les dirigeants gardent la tête plus froide, ils manquent pas de souligner qu'une telle victoire serait l'occasion de faire parler du club sur le plan local et sur le plan national.

Le 16 janvier au soir, les joueurs arrivent un à un à l'hôtel. Dans le hall, François GOMEZ, arrivé dans les premiers, salue chaque joueur et échange quelques propos avec chacun d'eux.

Ces derniers sont détendus. Ils s'attardent un peu. Ils se retrouvent. François GOMEZ attribue alors les chambres. Deux par chambre, choisis en fonction de leur caractère. Un nerveux, un calme.

  

  Cette équipe est plus jeune

François Gomez, ancien gardien, occupe la même chambre qu’Obitz. Entre goals, la compréhension sera facilitée. Les chambres sont agréables, toutes les conditions sont réunies pour que tous se sentent à l’aise. Obitz, dans sa chambre, nous confie encore : « cette équipe est plus jeune, mais elle est plus soudée qu’il y a 6 ans, quand nous avions joué les 32e de finale contre Nimes, le club professionnel de 1ere division. Nous étions alors entraînés par Jean Djorkaeff, qui était assisté de …. François Gomez.  Il y a aujourd’hui une ambiance très favorable et un esprit de solidarité plus fort qu’en 1976. Peut être parce qu’ils sont plus jeunes ? »

Cet effectif se compose, en effet, en majorité de joueurs, dont l’ancienneté en moyenne, au club, est de 2 ou 3 ans. Ils viennent pour la majorité des communes environnantes, Vaulx en Velin, Bron,VÉNISSIEUX. Il y en a même un qui vient de VILLEFRANCHE. De Décinois, il y en a peu, le problème de la formation des jeunes au sein du club est posé: "nous n'avons pas de pupilles, ni de minime. Pourquoi? parce que nous manquons de dirigeants." Cette phrase nous l'entendons revenir dans chacun de nos entretiens avec les responsables d'associations. Le manque de dirigeants entraîne des insuffisances dans les structures des clubs ou des associations, qui finissent par gêner leur essor. Les dirigeants de l'U.G.A., six d'entre eux étaient présents au lieu de rassemblement font pourtant preuve du plus grand dévouement moral et financier. Mais il en faudrait davantage. Cela pose la question de l'avenir du club: peut- il ambitionner la quatrième, voire la troisième division ?

 19 heures - Thierry ROLAND couvre les voix dans le salon de l'hôtel. Le tirage au sort de la Coupe du Monde de football a commencé. Tous les joueurs sont rassemblés devant le poste de télévision, sauf MOKRANE, le joueur algérien, qui a préféré regarder dans sa chambre.

Vraige KRIKORIAN, le secrétaire du club, s'installe au milieu des joueurs. Les pronostics et les souhaits vont bon train. Beaucoup de joueurs sont d'origine espagnole :CERVANTES, VALDIVIA, LAGO, aussi leur intérêt est-il encore plus grand. "France-Espagne, ce serait bien."

La France semble bénéficier d'un bon tirage au sort. La cérémonie traîne en longueur. François GOMEZ rappelle les joueurs à l'ordre: il faut aller à table. Mais la coupe du monde n'a lieu que tous les quatre ans... De plus, la France y est qualifiée!

Dans l'animation qui règne, on peut toutefois se rendre compte que deux ou trois joueurs sont tendus: la composition de l'équipe sera donnée après le repas. Ils ne savent pas s'ils en seront!

Par table de quatre, les joueurs s'installent. François GOMEZ et Paco PINERO s'installent seuls.

 L'entraîneur a fixé le cadre du menu: une entrée, une viande, un dessert. Nous sommes installés avec 2 dirigeants et Mokrane. Un des dirigeants, M. MADOYAN, distribue à chaque joueur et aux entraîneurs un poster aux couleurs de l'équipe qui a battu Cuiseaux.

La conversation porte sur la rencontre du lendemain, bien sûr, mais aussi sur les voyages accomplis par les dirigeants de l'U.G.A., tous Arméniens, pour aller voir jouer à MUNICH, l'équipe d'EREVAN, capitale de l'Arménie soviétique, contre le BAYERN de MUNICH. Cette équipe arménienne s'est produite, rappellent-ils, à Lyon, il y a quelques années.

La plus grande décontraction règne, l'appétit est bon. Avec nos compagnons de table, nous évoquons l'origine sociale des joueurs. Elle est parfois très différente. Les métiers sont divers,

intellectuels ou manuels, mais la plus parfaite cohésion règne entre le médecin, le carrossier, le plombier et l'étudiant en éducation physique.

   

Nous sommes considérés comme l’épouvantail

Plusieurs joueurs viennent se joindre à nous. On évoque alors l'absence de public lors des rencontres de championnat. "Pourtant on marche bien; en 25 matchs, nous n'avons perdu qu'une fois. Nous occupons actuellement la deuxième place du championnat et, peut-être, réintégrerons-nous la quatrième division. Encore qu'il n'y ait qu'un seul élu!

Dans ce championnat "Honneur" où nous évoluons, nous sommes considérés comme l'épouvantail.

Pensez que nous avons gagné 9 buts à 0 pour le premier match du championnat contre l'équipe de NORCAP à GRENOBLE. Du jamais vu. Depuis, on nous craint."

Après un café, l'entraîneur réunit les joueurs dans une petite salle; il va leur communiquer la composition de l'équipe. Il s'agit aussi de mobiliser les esprits sur la rencontre du lendemain. Après une courte réunion, quartier libre pour tous. Pour ceux qui souhaiteraient rester dans l'ambiance football, il a été prévu la diffusion, en vidéo, du dernier match France- Brésil. Mais l'appareil prêté ne fonctionnera pas. Flipper, cartes occuperont tout le monde jusqu'à 23h 30, l'heure du coucher.

"Demain matin, 8 h, debout - 8 h 30, petit déjeuner. Ensuite ballade de décontraction jusqu'à 10 h 30, heure du repas. A 12 h, on quitte l'hôtel pour le stade..." La suite, vous la connaissez: la défaite contre Digne 2 à 1.

Les joueurs décinois ont pourtant montré qu'ils égalaient largement les divisionnaires de DIGNE. Mais peut-être est-il difficile de ré-éditer, à un mois d'intervalle, un exploit comme celui du 20 décembre.

Un spectateur des tribunes suggérait une solution: "si je suis entraîneur, je mets FLEUROT à l'avant."

Classique réaction, après une défaite.

   (article paru dans le bulletin municipal de Decines en mars 1982)

Le résumé du match entre UGA Decines et Digne 17/01/82

Le résumé du match précédent contre Cuiseaux (Le Progres dec.81)